Laïcité(s) à double sens : Comment le contexte macro-sociétal national sert et détermine des régulations antagonistes des réponses exogroupes

Thèse dirigée par Théodore Alexopoulos

Soutenance le vendredi 9 décembre à 14h en salle 1029

Résumé :

L’étude des réponses négatives envers les minorités ethnoculturelles et de leurs conséquences délétères sur leurs membres est l’objet de décennies de travaux de psychologie sociale. Travailler à intégrer ces recherches est crucial pour cartographier les déterminants clés de ces réponses. Notamment, les recherches ont clarifié les processus intraindividuels « universels » impliqués dans l’élaboration des réponses exogroupes (e.g., préjugé), comme le fait que les individus régulent (i.e., ajustent) la teneur de ces réponses aux normes sociales prévalentes (e.g., égalitarisme). Néanmoins, l’examen de l’influence sociale est souvent déconnecté du contexte macro-sociétal national dans lequel elle s’exerce. En effet, les réponses exogroupes s’élaborent au sein de contextes nationaux caractérisés par des forces sociopolitiques institutionnelles. Parmi ces forces se trouvent les normes culturelles de diversité (i.e., normes nationales relatives à comment aborder les différences ethnoculturelles). Ces normes pourraient être un vecteur d’influence national de la régulation des réponses exogroupes. La France est un terrain d’étude privilégié pour examiner ce postulat car deux normes culturelles antinomiques coexistent. La Laïcité Historique, une norme centenaire prescrit l’égalité tandis que la Nouvelle Laïcité, une forme amendée appelle à l’assimilation (i.e., effacer les différences ethnoculturelles). La Nouvelle Laïcité est liée à des réponses plus négatives envers les minorités françaises que son antonyme Historique. Ce document défend la thèse que la Laïcité Historique et la Nouvelle Laïcité déterminent et servent des régulations antagonistes de réponses envers les minorités françaises. Dans le Chapitre
1 les fondements théoriques de cette thèse sont présentés. Un modèle de travail est défini pour examiner l’influence indirecte des Laïcités (i.e., via leur adhésion) et l’influence directe (i.e., via leur saillance) sur les réponses exogroupes. Le chapitre 2 teste l’hypothèse selon laquelle la saillance de la norme de Laïcité Historique favorise la suppression des réponses négatives tandis celle de Nouvelle Laïcité en permet la justification. Une étude, trois réplications et une extension examinent l’opération de ces processus à deux temps consécutifs sur la stéréotypisation. Une méta-analyse indique que l’effet causal des laïcités sur la stéréotypisation immédiate n’est pas robuste mais qu’il l’est sur la stéréotypisation subséquente. Le chapitre 3 teste si la saillance de la Nouvelle Laïcité augmente l’acceptabilité perçue des préjugés envers des minorités comparée à celle de la Laïcité Historique. Une étude (corrélationnelle), conduite lors des présidentielles françaises (2022), soutient cette hypothèse. La seconde étude (expérimentale) ne les réplique pas. Néanmoins, cette dernière montre que la saillance des Laïcités fait varier le soutien aux politiques de diversité (e.g., droit de vote des étrangers). Enfin, les deux études indiquent que les Laïcités comme normes perçues et normes personnelles expliquent une part de variance distincte de ces réponses. Dans le chapitre 4, une étude conduite lors des manifestations du Black Lives Matter (i.e., mouvement antiracisme, 2020) examine si l’adhésion aux Laïcités médiatise la relation entre l’ODS (i.e., déterminant générique) ou l’identification nationale (i.e., déterminant spécifique) et le soutien à ce mouvement. Les résultats indiquent que les deux types de déterminants participent distinctement à l’adhésion aux normes et en retour, au soutien du mouvement. Ces résultats sont répliqués à un an d’intervalle. Le Chapitre 5 est une discussion générale de ces travaux. Les résultats des chapitres empiriques sont analysés au regard de la thèse défendue, les limites et les futures directions de ces travaux sont proposées. Au-delà du contexte français, ces travaux participent à élaborer des modèles qui formalisent l’interaction entre des déterminants macro-sociétaux nationaux et des déterminants génériques (intra)-individuels dans les réponses exogroupes négatives.

 

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